Back from never (quite) gone

Résultats du M&A Monitor 2022

Le nombre de fusions et acquisitions opérées au niveau mondial a atteint un niveau record en 2021. Il a fortement augmenté après une brève diminution suite au confinement du premier semestre 2020. Les résultats du M&A Monitor 2022 en témoignent. Selon les chiffres enregistrés par BDO Belgique durant le premier trimestre de cette année, la relance se poursuit en 2022.

Qu’entendons-nous par « relance » ? Qu’est-ce que cela signifie pour les acheteurs et les vendeurs belges ? Et cette augmentation se maintiendra-t-elle dans un monde actuellement régi plus par les incertitudes que par les certitudes ? Nous avons interrogé quatre experts :

  • Alexi Vangerven, Partner Corporate Finance chez BDO Belgique
  • Jan Oosterlinck, Partner Financial & Family Business Advisory chez BDO Belgique
  • Mathieu Luypaert, Professeur en Corporate Finance - Responsable du Centre for Mergers, Acquisitions & Buyouts de la Vlerick Business School
  • Gianni Spolverato, doctorant au sein du Centre for Mergers, Acquisitions & Buyouts de la Vlerick Business School
     

Téléchargez le Vlerick M&A Monitor 2022
 

La grande valeur ajoutée du M&A Monitor ? Il objective les attentes des acheteurs et des vendeurs en matière de prix.
 

Le M&A Monitor montre que 2021 a été une grande année pour le marché mondial des fusions et acquisitions.

Gianni Spolverato : « L’année dernière, le marché mondial des fusions et acquisitions a atteint un niveau record de 5,9 milliards de dollars - en 2019, il se situait encore autour des 4 milliards de dollars. Dans notre pays, 73% des experts interrogés font état d’une augmentation significative du nombre de fusions et acquisitions par rapport à 2020 et 26% parlent même d’une augmentation de plus de 20%. L’augmentation est la plus élevée pour les transactions de tailles plus importantes, tandis qu’elle est plus modérée pour les transactions plus petites. Malgré ces bons chiffres, la Belgique suit la croissance record mondiale de manière moins prononcée car notre (petit) pays est moins sensible au marché de la fusacq. »

Mathieu Luypaert : « Ce volume record n’est pas surprenant. Les fonds de capital-investissement (Private Equity) et les investisseurs stratégiques ont constitué des réserves de capitaux pendant la pandémie de Covid-19 et tentent aujourd’hui de mettre à profit cette abondance de liquidités. Dans le même temps, d’autres facteurs tels que la relance et la croissance économique, la confiance retrouvée des CEO, l’essor des marchés des capitaux et les faibles taux d’intérêt constituent un terrain fertile pour la consolidation du secteur par le biais d’acquisitions stratégiques. Enfin, en 2020, sous la pression de la pandémie, un certain nombre d’opérations ont été reportées et redémarrées l’année dernière. »
 

Évolution des fusions & acquisitions en Belgique en 2021 

Source: M&A Monitor 2022 Vlerick Business School
 

En Belgique, la recherche d’opportunités d’investissements pour les fonds de capital-investissement dépasse-t-elle la recherche de capital pour les start-ups, les scale-ups ou les entreprises matures ?

Alexi

Alexi Vangerven : « En effet. Les entreprises qui sont sorties renforcées de la pandémie, qui se sont révélées ‘corona-proof’ en raison du secteur dans lequel elles opèrent (entreprises pharmaceutiques, de soins de santé, technologiques, etc.) ou qui ont été capables de s’adapter rapidement aux nouvelles conditions du marché sont particulièrement recherchées. La recherche de bons dossiers crée une surenchère entre les acheteurs potentiels. »

« Une entreprise  ayant survécu à la pandémie de Covid-19 est résistante à tout, et donc intéressante pour les acheteurs. » - Alexi Vangerven, Partner Corporate Finance chez BDO Belgique

Mathieu Luypaert : « Maintenant que le pic de la pandémie est passé, nous constatons néanmoins à nouveau un plus grand intérêt pour les entreprises qui étaient en difficulté pendant le confinement (matières premières, hôtellerie, tourisme, événementiel…) et qui génèrent à nouveau des flux de trésorerie positifs. Les secteurs où la vague de consolidation avait déjà commencé, tels que l’automobile, la domotique et le marketing numérique, se redressent également. »
 

En d’autres termes, les économies d’échelle et le leadership sont des leviers importants pour le marché de la fusion et acquisition ?

Alexi Vangerven : « Plus que jamais. Avec la mondialisation, nous constatons que davantage d’entreprises étendent leurs activités au-delà des frontières nationales. Suite à cette évolution, il y a plus de fonds de capital-investissement étrangers qui s’approchent du marché belge. Ils se tournent plus souvent vers les entreprises familiales qui disposent d’un portefeuille de clients fidèles. En effet, le potentiel de croissance de nombreuses entreprises de ce segment reste encore sous-exploité. L’apport financier et l’expérience d’un fonds de capital-investissement fournissent souvent le moteur nécessaire à cet effet. »

Jan Oosterlinck : « De nombreuses entreprises familiales à forte intensité en capital sont sous pression pour investir dans la numérisation et la durabilité. Ou elles cherchent des moyens d’entrer dans l’actionnariat en tant que nouvelle génération. Ou elles sont contraintes, de par la pénurie du marché du travail, d’automatiser les processus, ce qui est impossible de manière rentable sans économies d’échelle, ni ressources financières suffisantes. »
 

Jusqu’en 2019, nous avions principalement affaire à un marché de vendeurs (il était très intéressant de vendre). Depuis 2020, nous avons remarqué qu’il est devenu plus intéressant d’acheter. Cette tendance s'est-elle poursuivie en 2021 ?

Mathieu Luypaert : « En 2020, on s’attendait effectivement à ce qu’on passe, avec la crise, d’un marché de vendeurs à un marché d’acheteurs. Cela ne s’est pas produit. Aujourd’hui, nous sommes toujours dans un marché avantageux pour les vendeurs. La demande d’entreprises qui souhaitent fusionner ou qui sont ouvertes à l’acquisition dépasse encore largement l’offre. D’où les prix de rachat actuels, historiquement élevés. »

Alexi Vangerven : « Tant les fonds de capital-investissement que les investisseurs stratégiques sont à la recherche d’opportunités de consolidation dans le cadre d’une stratégie « buy & build » et/ou de diversification. Alors que chez BDO, nous avions un ratio de 80% de mandats de vente et de 20% de mandats d’achat, ce ratio est aujourd’hui d’environ 50%. »

Jan Oosterlinck : « La gestion des risques est beaucoup plus importante aujourd’hui qu’il y a 2 ou 3 ans, par exemple. La diversification est devenue un moteur important. Les entreprises essaient d’être beaucoup moins dépendantes d’un secteur, d’un groupe de produits ou d’une région spécifique. »
 

Qu’en est-il des financiers traditionnels, les banques ? Elles sont devenues plus prudentes pendant la crise du Covid-19. Leur goût du risque a-t-il à nouveau augmenté ?

Jan Oosterlinck : « Je constate que les banques sont devenues plus sélectives dans le choix de leurs dossiers et de leurs secteurs. L’analyse des risques va beaucoup plus loin. Le nombre de questions qu’elles posent augmente pour ainsi dire de jour en jour. En période de prospérité, en revanche, elles posent beaucoup moins de questions critiques. »

Gianni Spolverato : « Les chiffres de notre M&A Monitor ne montrent pas une diminution de la capacité d’emprunt. Nous constatons néanmoins des changements au sein des secteurs. Par exemple, les banques sont moins enclines à accorder des financements par emprunt ou par acquisition au secteur de l’événementiel et aux petits détaillants. Les structures des deals sont restées relativement stables, malgré une légère diminution de l’utilisation des earn-outs et des crédits vendeurs. En raison de l’incertitude croissante, les vendeurs veulent en avoir pour leur argent. Et comme la demande dépasse l’offre, les vendeurs peuvent imposer leurs conditions. »

« L'incertitude croissante incite les vendeurs à vouloir en avoir pour leur argent. » Gianni Spolverato, doctorant au sein du Centre for Mergers, Acquisitions & Buyouts à la Vlerick Business School

Gianni

Alexi Vangerven : « Les fonds ne cessent d’insister sur la possibilité de faire monter au capital la direction existante en vue de conserver le savoir-faire opérationnel à bord en cette période de guerre des talents. La plupart des fonds sont réticents à acquérir les biens immobiliers, car il s’agit d’un capital à faible rendement. Néanmoins, ils sont davantage disposés à reprendre l’immobilier dans les deals où  la concurrence est plus forte comme geste envers le vendeur.
 

Autre fait marquant : l’âge des vendeurs diminue.

Jan Oosterlinck : « La raison pour laquelle les investisseurs financiers se concentrent sur les dirigeants d’entreprises quadragénaires est double. D’une part, ils recherchent une personne qui souhaite continuer à diriger activement la prochaine phase de croissance de l’entreprise familiale. Ce faisant, ils s’assurent également du savoir-faire opérationnel, de l’expérience et de la force de l’entreprise. D’autre part, ils offrent à cette génération la possibilité de d’ores et déjà sécuriser une partie du capital accumulé dans l’entreprise familiale et de se développer professionnellement. »

Alexi Vangerven : « L'avantage pour le vendeur ? Il est beaucoup plus fort à quarante ans, car il a encore toute une carrière devant lui. Contrairement aux sexagénaires, il est moins dos au mur. »
 

Le boom du marché des fusions et acquisitions a-t-il un impact sur la façon dont les évaluations sont effectuées ? En effet, les chiffres sont maintenant ce qu'ils sont, alors qu'en période de crise, ils donnaient une image déformée de la réalité.

Mathieu Luypaert : « Les résultats de notre étude confirment que nous sommes sur un plateau depuis des années. Aujourd’hui, le multiple moyen valeur d’entreprise/ebitda est de 6,7 (soit 6,7 fois le cash-flow opérationnel), c.-à-d. un peu plus élevé que les 6,4 de 2020. Il varie de 4,5 pour les cibles d’une valeur inférieure à 1 million d’euros à 9,9 pour les deals d’une valeur supérieure à 100 millions d’euros. D’ailleurs, le multiple de 6,7 est nettement plus élevé que le multiple de 5 en 2013, lorsque nous avons commencé notre étude. »
 

Évolution des multiples 2013 > 2021

Source : M&A Monitor 2022 Vlerick Business School
 

Alexi Vangerven : « Plus la concurrence est grande, plus les offres sont élevées. C’est ce que l’on appelle la loi de l’offre et de la demande. »

Mathieu Luypaert : « C'est précisément la grande valeur ajoutée de notre M&A Monitor. Nous objectivons les attentes des acheteurs et des vendeurs en matière de prix. Et ce, dans les différentes catégories de taille des transactions. »
 

Les attentes pour 2022 sont tempérées par les tensions géopolitiques, l’explosion des prix des matières premières, l’incertitude de l’offre, l’évolution rapide de l'inflation et la hausse des taux d'intérêt à long terme.

Jan

Jan Oosterlinck : « Alors que les experts interrogés s’attendent, en moyenne, à des activités de fusions et acquisitions stables en Belgique en 2022, les banques, comme on le disait, resserrent leurs analyses des risques. Les risques géopolitiques et d’approvisionnement pèsent de plus en plus lourd à cet égard. Il y a 5 ans, ce type de risque n’était pas à l’ordre du jour. »

« Les risques géopolitiques et d’approvisionnement pèsent de plus en plus lourd dans les analyses réalisées par les banques. » Jan Oosterlinck, Partner Financial & Family Business Advisory chez BDO Belgique

Alexi Vangerven : « En raison de l’incertitude croissante, les vendeurs potentiels sont de plus en plus conscients que le vent peut très vite tourner et ils s’ouvrent donc plus facilement à une vente. La géopolitique, le prix des matières premières, le nationalisme alimentaire, etc. sont des catalyseurs importants, tout comme la vague actuelle de consolidation. En effet, en tant qu’acteur local ou régional, vous pouvez rapidement être confronté à de nouveaux concurrents étrangers qui ne se sont manifestés que récemment. Ou dont vous n’avez même jamais entendu parler. Les acheteurs (buy&build) commencent à leur tour à réfléchir aux avantages du nearshoring, mais cela ne se traduit pas encore par des propositions concrètes. »
 

Comment les normes ESG pèsent-elles davantage dans l'évaluation d’une entreprise ?

Mathieu Luypaert : « Au jour d’aujourd’hui, les normes ESG sont un aspect essentiel du commerce. Pourtant, les experts interrogés indiquent qu'ils n'ont pris en compte les facteurs ESG que dans 35% de leurs acquisitions stratégiques. Le Private Equity remporte de meilleurs résultats avec 49% de toutes les transactions, même si seuls 38% des fonds de capital-investissement belges interrogés ont une politique d’investissement ESG formelle. L’impact environnemental semble également être plus déterminant dans le contexte des fusions et acquisitions que les facteurs sociaux et de gouvernance. »

Gianni Spolverato : « La motivation diffère clairement entre les investisseurs stratégiques et les fonds. Ces derniers tiennent principalement compte de la création de valeur à long terme induite, par exemple, par des consommateurs de plus en plus exigeants en termes de normes durables et sociales. Alors que les investisseurs stratégiques abordent la conformité avec les facteurs ESG principalement sous l’angle de la gestion de la réputation. »

Jan Oosterlinck : « L’importance des facteurs ESG est peut-être déjà en train de mûrir dans l’esprit des investisseurs, mais aujourd’hui, nous la voyons rarement apparaître dans les due diligences, et les actionnaires familiaux commencent seulement à y penser. Tout le monde cherche encore comment intégrer objectivement les critères ESG dans sa proposition de valeur. Les banques, elles aussi, ne font que commencer à interroger les entrepreneurs sur leur vision de la durabilité, sans parler de leur capacité à mesurer et à contrôler la conformité avec les normes ESG, en particulier dans le segment du marché intermédiaire. Quoi qu’il en soit, je suis convaincu que les facteurs ESG deviendront des facteurs déterminants dans le secteur de la fusacq d’ici 2023. »

Mathieu Luypaert : « Mon message à tous ceux qui veulent mettre leur entreprise sur le marché d’ici 5 à 10 ans : assurez-vous que votre entreprise respecte bien les normes ESG ! »

« À ceux qui veulent mettre leur entreprise sur le marché d’ici 5 à 10 ans : respectez les normes ESG ! » - Mathieu Luypaert, Professeur de Corporate Finance à la Vlerick Business School

Filip

En tant qu’entreprise familiale, ne laissez passer aucune opportunité

Les entreprises familiales constituent un groupe cible recherché par les fonds de capital-investissement et les investisseurs stratégiques. La demande dépassant de loin l’offre, cette situation de marché offre aux entreprises familiales de nombreuses opportunités qui leur permettront de relever avec succès un certain nombre de défis auxquels elles sont confrontées, tels que :

  • absence de successeur au sein de la famille ;
  • donner à la direction en place la possibilité de reprendre le rôle ;
  • nécessité d’un programme d’investissement intensif pour assurer la transformation numérique de l’entreprise et la durabilité du modèle économique ;
  • mise en place d’une plateforme pour poursuivre l’expansion et la diversification ;
  • augmentation des économies d’échelle afin de rester compétitif à l'avenir ;
  • permettre à la génération suivante d’entrer au capital  d’une manière financièrement soutenable ;

Malgré cette situation favorable du marché, les entreprises familiales ne cartographient pas suffisamment leurs possibilités, ce qui signifie qu’elles passent à côté d’opportunités. Voici nos conseils aux dirigeants d’entreprises familiales :

  • Réfléchissez à temps à votre stratégie pour l’avenir ;
  • Faites appel à un tiers indépendant pour établir les différents scénarios possibles et évaluer l’impact de chacun. Les options sont nombreuses : elles peuvent envisager une transmission,   la recherche d’un ou plusieurs actionnaires, une montée au capital de la direction ou encore une cession complète ;
  • Quel que soit le choix de la famille, une bonne préparation et une planification par étapes sont essentielles pour assurer une transition en douceur qui tienne compte à la fois des intérêts de l'entreprise et des attentes familiales.
     

À propos de l'étude

Les résultats du M&A Monitor 2022 sont basés sur les réponses en ligne de 197 experts belges en fusions et acquisitions, recueillies entre le 7 février et le 5 avril 2022. Cet échantillon de professionnels des fusions et acquisitions est issu du réseau professionnel de la Vlerick Business School et de celui des partenaires du Centre for Mergers, Acquisitions & Buyouts, et complété par des recherches en ligne. L'enquête a été testée et vérifiée de manière approfondie par des praticiens et des universitaires. 

Le M&A Monitor distingue différentes catégories, allant des opérations d’une valeur inférieure à 1 million d’euros aux opérations de plus de 100 millions d’euros. 

La période est-elle propice à la croissance externe ? Ou bien voulez-vous céder (une partie de) votre entreprise - à la direction ou à un tiers ? Votre banque vous recommande une introduction en bourse… ou recherchez-vous des capitaux supplémentaires pour le financement de votre croissance ? Nos experts peuvent vous guider. Contactez notre équipe M&A.

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