Gouvernance et internationalisation, les clés pour les PME et scale-up ambitieuses

L’internationalisation est une étape charnière dans la vie d’une scale-up ou d’une PME. Elle promet des opportunités de croissance, de diversification et d’innovation, mais elle génère aussi une complexité nouvelle qui met à l’épreuve les fondations de l’entreprise. Dans ce contexte, la gouvernance joue un rôle déterminant.  

Par sa taille modeste et sa situation géographique au cœur de l’Europe, l’économie belge est fortement orientée vers l’exportation internationale et ne peut se contenter uniquement du marché intérieur. Les données fournies par le SPF Economie1 montrent qu’en 2024, l’Union européenne (hors Royaume-Uni) demeure la principale destination des exportations belges de biens, représentant 63,2 % du total. En y regardant d’encore plus près, on observe que l’Allemagne reste le principal client des exportations belges de biens, totalisant 53,1 milliards d’euros, devant les Pays-Bas (45,2 milliards) et la France (44,4 milliards). À eux seuls, ces trois pays ont représenté 40,9 % des exportations belges. 

Un conseil d’administration actif et structuré peut devenir un levier stratégique pour sécuriser et accélérer le développement à l’international. Encore faut-il qu’il exerce pleinement ses trois fonctions clés : stratégie, leadership et contrôle. 

1. Le rôle stratégique 

L’internationalisation est une adaptation - voire une transformation - stratégique importante qu’il ne faut pas négliger. Le conseil d’administration doit s’assurer que cette transformation s’inscrit dans une vision de long terme. Dans les PME et les scale-up, où les dirigeants fondateurs peuvent être fortement impliqués dans les décisions opérationnelles, le conseil joue un rôle crucial pour garder le cap et éviter les prises de décisions hâtives parfois malvenues. 

Concrètement, GUBERNA et BDO recommandent au conseil d’administration de se poser les bonnes questions lorsqu’il s’agit de conquérir de nouveaux marchés à l’international :  

  • Le marché ciblé s’inscrit-il de manière cohérente dans la stratégie globale de l’organisation ?
  • Quel mode d’entrée est envisagé pour pénétrer ce nouveau marché (partenariat, création de filiale, franchise, etc.) ?
  • Quelles ressources l’entreprise prévoit-elle de mobiliser pour ce développement ? Dispose-t-elle des moyens nécessaires pour soutenir cette expansion ?
  • Quelles solutions sont prévues pour gérer la complexité opérationnelle accrue (systèmes CRM, ERP, coordination des processus, etc.) ?
  • L’entreprise possède-t-elle les compétences internes requises pour assurer une intégration efficace sur ce nouveau marché ?

Jan Oosterlinck, Partner Financial & Family Business Advisory chez BDO, insiste particulièrement sur l’évaluation précise des besoins de financement nécessaires au développement d’un nouveau marché, ainsi que sur un calendrier réaliste. 

Enfin, il est important de souligner qu’un bon conseil d’administration agit également comme interface stratégique entre le siège et les nouvelles entités.  

2. Le rôle de leadership 

Au-delà de ses fonctions stratégiques, le conseil d’administration exerce un rôle de leadership, souvent moins visible mais pourtant essentiel. Il contribue à incarner les valeurs de l’organisation, à diffuser une culture d’entreprise spécifique et à maintenir l’unité d’une entreprise opérant dans des contextes multiples. 

Premièrement, l’enjeu consiste à préserver une identité propre à l’entreprise, conciliant diversité et cohérence. Il est donc primordial de développer une gouvernance internationale efficace, reposant sur des principes partagés définis par le conseil d’administration, qui permettent à la marque d’être identifiable au-delà des frontières. Un équilibre subtil doit ainsi être trouvé, instaurant une certaine uniformité tout en laissant une marge de manœuvre aux spécificités locales. 

Ensuite, le conseil joue également un rôle de soutien, de stimulation et d’évaluation de l’équipe dirigeante, en particulier lors des phases de transformation organisationnelle. Dans le cadre d’un processus d’internationalisation, de nombreux défis doivent être relevés par la direction, et il est essentiel que le conseil d’administration soit actif et engagé tout au long de ces évolutions. On pense notamment aux enjeux liés aux ressources humaines, qui sont cruciaux dans une dynamique de développement à l’international. La réflexion sur les profils nécessaires à une expansion réussie incombe en partie au conseil, comme par exemple la mise en place d’un management intermédiaire interculturel facilitant l’implantation de l’entreprise. 

Jan Oosterlinck, Partner Financial & Family Business Advisory chez BDO, souligne avec pertinence que le soutien du conseil d'administration à l'égard de l'équipe dirigeante chargée du développement d’un nouveau marché est essentiel – en particulier lors des premières étapes d’internationalisation. Cette équipe doit se sentir appuyée dans sa démarche, ce qui peut impliquer des interactions plus fréquentes avec la direction locale.  

Enfin, les questions liées à la durabilité relèvent également de la responsabilité du conseil d’administration. Dans un contexte où les normes internationales sont de plus en plus complexes, il est impératif de veiller au respect des standards ESG et de garantir une surveillance rigoureuse de l’ensemble des activités du groupe. 

3. Le rôle de contrôle   

Enfin, le dernier rôle qui incombe au conseil d’administration d’une organisation est celui du contrôle de celle-ci. En effet, il revient au conseil d’administration d’analyser la performance de l’entreprise et du suivi des résultats financiers et opérationnels, d’évaluer l’appétit au risque et de s’assurer de la conformité avec les réglementations en vigueur. 

Lorsque qu’une PME ou une scale-up décide de développer ses activités à l’international, cette dernière s’expose à des environnements juridiques, fiscaux, sociaux et culturels hétérogènes. Dans ce cadre, les risques se multiplient : non-conformité réglementaire, instabilité politique, délais de paiement rallongés, perte de marchandises ou retenues aux frontières, risque de cybersécurité ou encore diversité culturelle. Dans ce contexte, le conseil d’administration doit renforcer son rôle de surveillance et de contrôle des risques. 

En premier lieu, cela implique de mettre en place une cartographie précise des risques internationaux dès que possible et la mise en place de dispositifs de conformité adaptés à chaque marché (normes comptables, conformité avec les règles RGPD locales, etc.).  

Ensuite, le conseil doit veiller à ce que les mécanismes de reporting fiables soient mis en place, même à distance, et que le management local rende des comptes de manière régulière au conseil d’administration. 

Enfin, il peut être judicieux de nommer un ou plusieurs administrateurs qui ont une expérience en matière d’internationalisation ou qui connaissent en profondeur les caractéristiques du nouveau marché où l’activité souhaite être développée. 

Conclusion : gouvernance et internationalisation, un tandem stratégique 

Dans un contexte d’internationalisation des PME et des scale-up, le rôle du conseil d’administration se renforce autour de trois axes majeurs : la stratégie, le leadership et le contrôle. 

D’abord, le conseil doit assurer une surveillance accrue face à la diversité des risques liés aux environnements juridiques, fiscaux et culturels. Cela passe par la mise en place de dispositifs de conformité adaptés, un reporting fiable à distance, et l’intégration de profils expérimentés en internationalisation.  

Ensuite, sur le plan stratégique, il veille à ce que l’expansion internationale s’inscrive dans une vision de long terme, en posant les bonnes questions quant à la cohérence, aux ressources mobilisées et aux compétences nécessaires. 

Enfin, le conseil exerce un rôle de leadership en incarnant les valeurs de l’organisation et en garantissant une culture d’entreprise cohérente à l’échelle globale. Il accompagne les dirigeants dans les transformations, veille à l’adaptation des RH, et s’assure du respect des normes ESG. Ce triptyque – contrôle, stratégie et leadership – fait du conseil d’administration un acteur clé de la réussite internationale. 

Vous avez des questions relatives au Family Business Succession Planning ? Contactez notre expert Jan Oosterlinck 

1 SPF Economie, https://economie.fgov.be/fr/themes/analyses-et-etudes/conjoncture-en-belgique/commerce-exterieur-belge.